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AMÉNAGEMENT DURABLE DES CAMPAGNES

L'ASSOCIATION BRUDED : UN BIORÉGIONALISME AFFIRMÉ

Le milieu rural revêt une multitude de caractéristiques et de dynamiques complexes qui lui sont propres et qui sont variables dans l’espace, dans le temps. Le caractère distinct des activités et des forces qui composent la campagne induisent des perceptions, modes d’occupation et d’appropriation du territoire qui ne fonctionnent pas selon les mêmes logiques qui opèrent en milieu urbain. Devant ce constat, et en raison des pressions de l’urbanisation qui pèsent de plus en plus lourdement sur le territoire rural,  des approches conceptuelles ont entrepris de se pencher plus sérieusement sur l’aménagement des campagnes. Ces approches  ont en commun de proposer des pistes pour la redéfinition d’un mode d’emploi pour une urbanisation cohérente des espaces ruraux. Cette question, souvent abordée, a été étayée par plusieurs approches dont le Conservation Design, le New Ruralism, le Landscape Urbanism et le Rural Design. Dans la présente étude de cas, seuls les concepts du New Ruralism et du Rural Design ont été utilisés comme cadre afin d’analyser l’éco-hameau de Langouët sous l’angle de l’aménagement durable. C’est deux concepts ont été choisi car ils semblent mieux rejoindre les principes que soutiennent les artisans des nouveaux aménagements durables au sein du noyau villageois de la commune de Langouët. Il est donc intéressant de vérifier la viabilité de ces concepts sur le terrain. 

UN MILIEU DE VIE DE QUALITÉ

En Bretagne, Langouët fait partie des communes pionnières qui, en 2005, ont décidé de mutualiser leurs réflexions et leurs moyens au sein d’un réseau solidaire d’échanges d’expériences et de réalisations de développement durable : l’association Bretagne Rurale et rUrbaine pour un Développement Durable (Bruded). L’objectif est alors que les élus des différentes communes puissent échanger, se soutenir mutuellement et promouvoir une nouvelle démarche de « projet » axée sur la démocratie participative 

Cette vision régionale de l’aménagement est depuis longtemps établie en Bretagne : en 1983 un fonds d’aménagement urbain (FAUR) est mis sur place. Ce fond a pour but de promouvoir les projets de développement urbain à l’échelle supranationale. Depuis 2005, ce fond est devenu l’Éco-FAUR et favorise un développement en amont sur le territoire par le biais d’un financement spécifique afin de mettre en oeuvre des projets d’aménagement publics (espaces publics, bâtiments publics, quartiers nouveaux, réhabilitation ou densification de quartiers existants). Ce fond permet de faire évoluer les pratiques règlementaires, notamment dans le domaine de l’aménagement durable et de l’environnement (biodiversité, énergie, eau, etc.) à l’échelle de toute la région 

Cette organisation des communes et des villages dans le paysage rural que prônent les tenants du New Ruralism marque le territoire de la Bretagne qui s’organise en hameaux villageois de petite et moyenne taille. Langouët est un bon exemple de ce type d’organisation territoriale où le noyau du village se situe au centre des terres agricoles qui deviennent l’élément structurant du village. En effet, dans un souci de préserver le paysage agricole de la commune, le noyau villageois s’est urbanisé de manière consolidée et relativement compacte. Les nouveaux développements résidentiels qui s’y rattachent en ce moment suivent cette même logique de consolidation des zones urbanisées et intègrent les structures urbaines, paysagères et sociales du noyau villageois de la commune.

334 projets accompagnés entre 2005 et 2008 dont 60% ont été portés par des communes de moins de 2 000 habitants (, 2011).

L'ÉCO-FAUR EN QUELQUES CHIFFRES C'EST... 

  • Source :Der Madirossian et Vautrin, 2011

RURAL DESIGN // Étant sensible à la situation fragile des milieux ruraux vis-à-vis l’urbanisation accrue et la forte compétition agricole, le Rural Design prône la mise en valeur d’une vision rurale à l’échelle régionale qui passe outre les frontières administratives. Cette approche met de l’avant l’idée que les différents éléments de paysage communs, comme une forêt ou des milieux humides entre certaines régions rurales, sont beaucoup plus aptes à lier les milieux ruraux entre eux et donc ainsi créer des opportunités économiques. Dans ce cas, on peut parler d’un certain « biorégionalisme » qui pourrait organiser le territoire régional des milieux agricoles selon les principes de paysage étayés par le Rural Design (Thorbeck, 2012).

Grâce au travail de l’association Bruded et du programme Éco-FAUR, les politiques d’urbanisme en Bretagne tendent vers un certain « biorégionalisme » prôné par les tenants du Rural Design en dépassant les limites administratives pour plutôt créer des liens entre les différentes communes rurales partageant des éléments de paysage et un contexte environnemental commun. 

NEW RURALISM // Le New Ruralism prône la préservation et l’amélioration du milieu rural périurbain, espace indispensable à la vitalité économique, culturelle et environnementale des régions métropolitaines (Kraus, 2006). Cette approche est également dite à la rencontre des courants du Smarth Growth et de l’agriculture durable parce qu’elle revêt un double objectif : celui de développer des milieux de vie de qualité et celui de promouvoir des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement, privilégiant une meilleure qualité des aliments et la consommation locale (M. Stratton, 2009).

UN NOYAU VILLAGEOIS CONSOLIDÉ ET STRUCTURÉ PAR SON IDENTITÉ RURALE

À l’image du New Urbanism, l’approche états-unienne du New Ruralism entend mettre de l’avant une façon de développer des lotissements périurbains s’inspirant de modèles « plus européens » (Schmitz, 2008). De fait, et contrairement à l’approche du Conservation Design et du développement par grappes, il s’agit de développer le territoire agricole en un chapelet de petits villages et de hameaux, c’est-à-dire en groupements relativement denses d’habitations articulés autour de noyaux d’activités de différents ordres permettant le développement, et le renforcement de l’identité du milieu rural en lien avec ses attributs physiques, sociaux, culturels, etc. 

QUARTIER PRAIRIE MADAME

Dans le bourg centre de la commune, les maisons se ressemblent toutes sans nécessairement être les mêmes. Ce principe a été réinterprété dans le design du lotissement de La Prairie Madame qui propose une offre de logements inscrits dans le patrimoine bâti local et dans le respect des maisons traditionnelles environnantes. Les maisons individuelles construites en isolé ou mitoyennes reprennent les caractéristiques architecturales du bâti existant par leurs implantations, leurs volumétries. En ce qui à trait aux matériaux utilisés soit un bardage de bois pour les façades et des toitures en ardoise, ceux-ci diffèrent quelque peu du reste du village, mais ce surtout à des fins d’efficacité énergétique.

 

ÉCO-HAMEAU DE LA PELOUSIÈRE

Poussé par les mêmes préoccupations de densité et de respect du caractère du tissu villageois existant, un second projet de lotissement a été réalisé dans le noyau villageois de la commune. L’objectif de la Pelousière est de créer des logements écologiques performants tout en étant accessibles aux personnes à bas revenus, en accession sociale ou en logements semi-collectifs aidés. De cette manière cet éco-hameau vient compéter l’offre développée dans le lotissement de la Prairie Madame et rejoint les objectifs de mixité résidentielle et sociale souhaitée par la commune (Der Madirossian et Vautrin, 2011) . Le développement de la Pelousière s’est déroulé selon une approche conjointe de la technique et de l’architecture, autant en amont du projet que tout au long de la démarche, ce qui a permis à la commune de réaliser des économies substantielles sur les coûts tout en réalisant des bâtiments hautement performants écologiquement.

Dans le but de réduire l’impact du bâti dans le paysage rural et de respecter la densité déjà présente afin de consolider le noyau villageois, des parcelles de terrain relativement réduites ont été délimitées s’accrochant au tissu urbain existant (284 m2 à 484 m2 pour la plus grande). La densité obtenue est alors d’environ 24 logements par hectare.

DENSITÉ, MIXITÉ ET AGRICULTURE À ÉCHELLE HUMAINE

En plus de favoriser un développement en hameau consolidant de ce fait les zones déjà urbanisées en milieu rural, le New Ruralism va plus loin et prône aussi des communautés denses et compactes garantes d’une certaine mixité des activités afin de laisser libre le plus de territoire possible et d’assurer la pérennité des activités agricoles. De plus, pour arriver à faire perdurer l’agriculture sur le territoire, le New Ruralism favorise  les petites et les moyennes productions agricoles ainsi que les liens producteurs-consommateurs (Kraus, 2006).

 

Dans la commune de Langouët, ces principes se concrétisent par un projet aux multiples facettes et catalyseur au cœur du noyau villageois. C’est par la réhabilitation de l’école maternelle et primaire Janusz Korczak que Langouët a été en mesure de créer  un pôle mixte pour l’éducation, l’administration, l’agriculture locale et l’économie sociale. En plus des trois classes primaires et de la classe de maternelle, le bâtiment de l’école, rénové selon les principes de construction de Haute qualité environnementale (HQE), abrite aussi la mairie de la commune, une cantine biologique ainsi qu’une pépinière de l’économie sociale et solidaire. Construit dans la simplicité et en évitant les espaces inutiles, plusieurs fonctions sont ainsi réunis dans le même espace pour optimiser les coûts d’investissement. Dans ce même esprit, le bâtiment de l’école est étudié de façon à pouvoir évoluer dans le temps et être adapté à différents usages ou fonctions (Der Madirossian et Vautrin, 2011).

 

Le projet de rénovation et de restructuration de la cantine de l’école a permis de mettre en place un système d’approvisionnement en aliments provenant de l’agriculture locale et saisonnière au sein même de la commune. La problématique d’approvisionnement de la cantine renvoie directement aux enjeux économiques locaux liés à l’agriculture locale. La commune s'est alors doté d’un protocole de vigilance avec la SAFER (Société d’aménagement foncier et d’établissement rural) afin de surveiller l’achat et la vente de terrains qui pourraient affecter les terres de l’agriculture maraîchère biologique structurante de la commune (Der Madirossian et Vautrin, 2011).

 

 

De par ces projets, la commune a su faire rayonner le pôle du noyau villageois à travers son territoire plus large. Aussi intéressante que celle-ci peut l’être, la pépinière de l’économie sociale ne peut soutenir l’économie de la commune. En effet, du point de vue de la mixité des activités, Langouët ne rencontre pas les principes du New Ruralism. Aucun commerce de proximité n’est répertorié dans le cœur villageois. Les habitants doivent donc faire plusieurs déplacement de moyenne distance afin d’avoir accès aux services courants et semi-courant nécessaires au quotidien.   

Dans le même ordre d’idées, le bâtiment de l’école accueille aussi des associations et des coopératives qui interviennent dans le domaine du développement durable ou de l’utilité sociale. Cette pépinière de l’économie sociale permet à des petites et moyennes entreprises (PME) de prendre forme et de se développer. Après les deux premières années de fonctionnement, six entreprises se sont installées dans le bâtiment qui a une capacité de dix (Der Madirossian et Vautrin, 2011).

 

  • Source : Bing maps, 2013
  • Source : Garzick, 2004
  • Source :Der Madirossian et Vautrin, 2011
  • Source :Der Madirossian et Vautrin, 2011
  • Source : Bruded.org
  • Source :Langouët.fr
  • Source :Der Madirossian et Vautrin, 2011
  • Source : Bing maps

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